You are currently viewing La fourbure d’hiver

La fourbure d’hiver

Si vous êtes farouchement anti-couverture, cet article ne vous plaira pas. Je préfère le dire avant que vous n’alliez plus loin. Mon but n’est pas de faire polémique, je souhaite juste transmettre une information que je trouve importante. Prenez-la ou laissez-la de côté, ceci est votre choix. 

Chez le cheval fourbu, cette information peut toutefois être capitale.

Voici une question qui revient souvent :

Mon cheval a les pieds sensibles depuis que ça gèle, je me demande si c’est parce que le sol est dur…?

Ici le sous-entendu est en général de savoir comment protéger et/ou durcir la sole…sans imaginer que le problème n’est pas forcément là. On va alors chercher des solutions locales, onguents divers et variés, semelles et chaussures…sans imaginer un instant que le problème puisse être beaucoup plus basique et que cela puisse venir de la température ambiante.

La première crise de fourbure de Tristam, assez violente, s’est déroulé il y a de nombreuses années, au mois de février. Je pense qu’il faisait quelque chose comme -12° à l’écurie à ce moment-là. Jusque-là il n’avait JAMAIS eu le moindre signe de fourbure sur les pieds, et encore moins eu la moindre crise. A l’époque je n’avais absolument pas fait le lien avec le froid. Il avait pris d’un coup la position antalgique caractéristique d’une grosse crise. Je l’avais couvert parce que j’avais pensé qu’en étant tellement contracté, il aurait forcément froid et que des contractures musculaires allaient s’ajouter à sa fourbure. 

A l’époque il n’avait eu aucune séquelle. Absolument rien de visible en tout cas…si ce n’est une douleur violente qui aura perduré un certain temps.

Une autre question est aussi récurrente :

Mon cheval est plus sensible l’hiver, comment savoir si c’est de l’arthrose ou une crise de fourbure ?

Pour faire simple, si votre cheval est à risque de fourbure, j’aurais tendance à dire que ça pourrait être les 2 !! Et ça, il n’y a que le vétérinaire qui est habilité à le déterminer.

Si votre cheval est plus sensible avec le froid…et bien il est fort probable qu’il a froid ! Ça parait logique quand on parle de nos enfants ou de nos chiens, mais bizarrement on a tendance à refuser cette capacité à souffrir du froid à nos chevaux. On veut les voir comme des bêtes rustiques qui sont « faites pour » vivre dehors. Sauf que génétiquement, la plupart de nos chevaux ont été sélectionnés et élevés pour le sport et le loisir, pas pour la vie sauvage. Le cheval sauvage en tant que tel n’existe plus. Et, n’en déplaise à certains, dans certaines régions du monde le froid (généralement le froid humide dans ces cas là) est le principal facteur de mortalité…chez les chevaux sauvages justement. Il y a eu une étude là-dessus sur une petit île asiatique. C’est une éthologue qui m’en avait parlé au cours d’un stage, je n’ai hélas pas la référence. Hormis le froid et la forte humidité locale, aucun facteur ne prédispose ces chevaux à mourir prématurément. Bien entendu, certaines races sont beaucoup plus rustiques que d’autres. Mais même chez ces chevaux là, certains souffrent du froid…et de fourbure d’hiver.

Venons-en au sujet qui nous intéresse : la FOURBURE qui survient l'hiver

Si votre cheval fait des crises douloureuses l’hiver, testez la chaleur de ses pieds. Un pied sain doit être légèrement chaud, tiède ou éventuellement frais selon le métabolisme du cheval, mais aussi selon la température extérieure. D’ailleurs, en été après une longue journée ensoleillée, les pieds sont souvent chauds le soir et frais le matin, ce qui est parfaitement naturel. 

Lorsqu’un cheval fait une VRAIE crise de fourbure de type inflammatoire, ses pieds sont chauds, voir très chauds

Si votre cheval fait une crise douloureuse en hiver et que ses pieds sont froids, il souffre alors probablement de ce qu’on appelle une FOURBURE D’HIVER. C’est une phénomène assez peu connu et pourtant beaucoup plus répandu qu’on ne le pense. 

Pour résumer simplement, le froid est vasoconstricteur. Quand le cheval a froid trop longtemps (n’oublions pas que le froid vient de l’air ambiant, mais qu’il monte aussi du sol), la vasoconstriction peut être tellement intense que les cellules du pied ne seront plus alimentées. Ça peut être EXTRÊMEMENT douloureux pour le cheval qui y est sujet. Fort heureusement, la crise peut passer très vite : il suffit souvent de réchauffer le cheval en le rentrant sous un abri paillé et en le couvrant. Pour un effet plus rapide, on peut lui poser des guêtres de transport en mouton synthétique ou des guêtres de repos doublées de flanelles : le but étant ici de réchauffer les membres et les pieds directement (un peu comme vous mettriez une paire de gants).

Si vous pensez que refroidir les pieds à ce moment là est LA solution (puisque le cheval est en crise aiguë), souvenez-vous de ce que ça fait de plonger ses mains dans l’eau glacée en hiver. En été ça passe, en hiver c’est juste insupportable…c’est même franchement douloureux. Ce n’est pas de l’anthropomorphisme, c’est juste du bon sens : si c’est le froid qui a déclenché la vasoconstriction, il suffit souvent de réchauffer les pieds pour que la crise passe

J’ai discuté il y a quelques années avec une dame québécoise dont le cheval faisait une crise avec bascule chaque hiver… Tous les ans elle réhabilitait ses pieds grâce au parage, et tous les hivers ça recommençait malgré un régime strict. Pendant longtemps, elle n’avait pas compris ce qui déclenchait les crises. Puis le cheval avait fini par en arriver au point où il ne pouvait pas passer plus de 30 minutes les pieds dans la neige sans protection : il déclenchait systématiquement une crise violente. Au final pour ce cheval, la solution a été de l’habiller comme on habille un enfant qui va au ski : manteau, pantalon et bottes fourrées.

En cas de fourbure d’hiver, si vous ne réchauffez pas votre cheval et qu’il reste dans cet état durant un certain temps, il peut y avoir des séquelles au niveau vasculaire et même parfois une bascule. Le risque est en effet que se développe une nécrose tissulaire. En clair, les tissus sains vont mourir par manque d’alimentation. Et une fois tous les tissus morts…on n’est plus dans le cadre d’une réhabilitation classique. Pour les alpinistes à qui ça arrive, la seule solution est l’amputation. Pour notre cheval, ça peut commencer par des abcès récurrents, une boiterie chronique et à long terme des séquelles parfois dramatiques.

Alors même si vos convictions sont qu’un cheval ne devrait pas être couvert parce qu’en tant que cheval, il n’en a pas besoin, en cas de doute, ça peut parfois valoir la peine de passer au-delà de ses principes et convictions. Au pire, vous l’aurez couvert pour rien et, soyons clairs, ça ne lui fera strictement aucun mal.

Par contre si c’est bien le froid le problème…je vous laisse tirer vos propres conclusions !

Si mon cheval fait des crises en hiver, comment puis-je les prévenir ?

Bien entendu, vous l’aurez compris, la première chose est de couvrir votre cheval. Mais pas avec une couverture imperméable type 0 grammes. Il faut lui apporter de la chaleur. Une couverture uniquement imperméable peut parfois faire plus de mal que de bien. J’ai écrit un article connexe sur le sujet.

Chez certains chevaux, le problème sera lié à la température ambiante. Mais pour d’autre, cela sera dû au fait que les pieds soient sur un sol froid. Dans ce cas, on peut simplement réchauffer les membres sans forcément couvrir le dos. Donner accès à un abris paillé et protégé des courants d’air peut parfois suffire. Ça va vraiment dépendre du cheval. 

Pourquoi couvrir est-il la première chose à faire ? Tout simplement parce que poser une couverture sur le dos d’un cheval, ça prend tout au plus 5 minutes…et que parfois c’est la seule et unique chose à modifier

La seconde chose à faire est de vérifier que toutes les conditions sont optimales pour le bien de votre cheval : 

  • alimentation adaptée,
  • parages adéquats,
  • Traitements médicaux si nécessaire,
  • etc. 

Et si mon cheval fait une crise en hiver malgré tout ?

Si votre cheval fait malgré tout une crise, faites-vous aider.

Vous devez impérativement prendre contact avec votre vétérinaire. LUI SEUL est habilité à vous dire s’il s’agit bien d’une nouvelle crise de fourbure. Vous pourriez facilement passer à côté d’autre chose sans le savoir. Un cheval qui a déjà fait des fourbures a souvent d’autres problèmes liés à son état, même si la fourbure a été entièrement réhabilitée. Et un de ces problèmes, c’est une mauvaise vascularisation : un pied dont P3 a bougé a forcément subi de fortes compressions veineuses et, par voie de conséquence, une destruction partielle du réseau sanguin. Ou tout au moins une fragilité à ce niveau là.

Si toutefois vous ne réussissez pas à solutionner le problème, parce que la cause reste mystérieuse pour vous, je propose des bilans personnalisés complémentaires au passage du vétérinaire. 

Vous trouverez plus d’informations en suivant ce lien.

Cet article a 2 commentaires

Les commentaires sont fermés.