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La fourbure de pâturage

Mais qu'est-ce qui cause les fourbures des chevaux au pré ?

Voici ce que vous lirez le plus régulièrement : 100% des fourbures de pâturage sont de type hyper-insulinémique

Cette théorie suggère que la seule raison des crises de fourbure du cheval au pré serait que le cheval ne supporte pas l’herbe qu’il ingère. Et cela lui ferait sécréter donc trop d’insuline. 

Pour beaucoup de chevaux, cette théorie est vraie. Mais ce n’est pas le cas pour tous.

Tout d'abord, peut-on affirmer de manière formelle que c'est uniquement l'herbe qui est en cause chez le cheval au pré ?

Par principe de précaution, lorsqu’un cheval fait une crise de fourbure, on devrait toujours le retirer du pré un certain temps et le nourrir uniquement avec du foin

Mais ce n’est pas parce que votre cheval a déclenché une crise en étant au pré que c’est forcément l’herbe qui est en cause. Le plus souvent, l’herbe est au cœur du problème, mais ce n’est pas systématique

Si on se focalise uniquement sur l’herbe, on peut passer à côté de la véritable cause…que je ne vous citerai pas ici de manière formelle. En effet, il existe de nombreuses causes de crises aiguës de fourbure lorsque notre cheval a accès à l’extérieur : 

  • intoxication par des glands ou par d’autres plantes toxiques,
  • fourbure d’hiver liée au froid : il arrive même que certains chevaux déclenchent des crises uniquement en hiver en mangeant du foin et qu’ils retournent au pré au printemps sans problème, ce qui de prime abord peut sembler très étonnant, 
  • récidive d’une fourbure préexistante,
  • colique (liée au froid, à l’herbe, au sable, etc)
  • infections diverses
  • une maladie telle qu’un PPID (ou cushing équin)
  • etc, etc.

Admettons que dans le cas de votre cheval, ce soit bien l'herbe qui soit au cœur du problème

Dans ce cas, il est fort probable que ce qui a provoqué la fourbure est une hyperinsulinémie. Mais ce n’est pas certain et encore une fois, la cause peut être différente d’un cheval à l’autre.

  • Chez certains chevaux, le problème est que l’herbe est trop riche. Elle est alors parfois trop chargée en glucides, et elle est souvent tout simplement « trop calorique ». Nos prairies sont en effet généralement prévues pour engraisser les vaches.

  • Chez d’autres chevaux, c’est la quantité d’herbe ingérée jour après jour qui va poser problème : notre cheval va alors ingérer tout simplement trop de calories, se mettre à grossir et finir par devenir résistant à l’insuline.

  • Dans d’autres cas, l’hyper insulinémie ne sera pas provoquée directement par l’herbe en elle-même, mais elle sera secondaire à une pathologie préexistante, connue ou non : PPID, acidose, etc. L’herbe ne sera alors que le révélateur de cette maladie. 

Peut-on en conclure que 100% des fourbures liées à l'herbe sont de type hyper-insulinémique ?

Là où cela se complique, c’est que chez certains chevaux, plus nombreux qu’on ne l’imagine, c’est le système digestif est dégradé. Il vont alors développer une sensibilité à l’herbe, à la manière d’une intolérance alimentaire. La crise aiguë peut alors être liée à une acidose intestinale qui va causer et entretenir un intestin poreux. Ce phénomène est bien connu chez les chevaux de course qui perdent de l’état à cause d’une alimentation trop riche en concentrés, mais aussi à cause d’un entraînement physique intensif. Il commence seulement à être vraiment étudié chez nos « gros ».

Le soucis est que lorsque l intestin est dégradé de cette manière, c’est TRÈS compliqué de lui faire récupérer totalement son intégrité. Et cela va engendrer d’autres pathologies : carences, inflammations chroniques de toutes sortes, déminéralisation osseuse, problèmes de peau et, bien entendu, des fourbures aiguës plus ou moins graves.

Je parle parfois de « cause septique » et non pas de fourbures liées à un sepsis. Je fais une vraie différence entre ces deux phénomènes. Un sepsis est un choc septique qui met gravement en jeu le pronostic vital (colique, métrite, pneumonie, etc). Quand je parle de cause septique, cela peut bien entendu être un sepsis, mais cela peut aussi être une petite colique qui va passer inaperçue ou encore un état infectieux ou inflammatoire chronique tel qu’une acidose digestive.

Comment prévenir le mieux possible les crises de fourbure au printemps ?

Lors de la mise à l’herbe au printemps, si le cheval fait des « bouses », c’est le signe qu’il se passe quelque chose d’anormal au niveau de l’intestin. Ce n’est PAS normal

À première vue cela semble anodin et en général ça ne laisse pas de séquelles. Mais chez certains chevaux, années après années, cela peut entraîner une dégradation de la paroi intestinale et une porosité de l’intestin. Et un jour, sans qu’on comprenne pourquoi, notre cheval qui allait sans problème à l’herbe jusque-là déclenche une crise subite et parfois assez violente. Chez certains chevaux qui étaient habitués à l’herbe, il suffira parfois subitement de toutes petites quantités d’herbe.

Il est donc primordial de faire une transition la plus PROGRESSIVE possible, idéalement sur plusieurs semaines. En effet, la porosité intestinale est un facteur de résistance à l’insuline et elle est souvent liée à un surpoids. 

En amont, si le cheval est en surpoids à l’automne, on profitera de l’hiver pour le faire maigrir : en effet,plus le cheval est gros, plus son organisme sera résistant à l’insuline. Et plus il sera résistant à l’insuline, plus il sera à risque de fourbure. 

Qu'en est-il de l'herbe d'hiver ?

L’herbe gelée peut aussi être une cause d’hyperinsulinémie. En effet, lorsque le soleil réapparait et que la température remonte, les taux de sucre des végétauxremonte lui aussi : c’est évidemment néfaste pour notre cheval insulino-résistant.

Mais il y a un point qui est plus rarement pris en compte : l’herbe gelée, tout comme l’eau glacée, peuvent être à l’origine de dommages digestifs et de coliques. En effet chez certains chevaux sensibles, cela va entraîner des spasmes intestinaux et parfois même de la diarrhée. Ces coliques passent souvent inaperçues et peuvent pourtant être à l’origine d’une crise aiguë. On peut alors penser que la cause est un excès d’insuline lié aux taux de glucides de l’herbe, mais ce n’est pas forcément le cas. 

Et si mon cheval sécrète effectivement trop d'insuline ?

En cas de suspicion de SME (syndrome métabolique équin), la première chose à faire est d’appeler votre vétérinaire pour effectuer un bilan sanguin avec lui. Seule une mesure des taux d’insuline peut vous confirmer le diagnostic. Quelques symptômes peuvent bien-sûr très fortement vous alerter, mais seul un bilan sanguin pourra confirmer l’insulino-résistance. Il est aussi souvent intéressant de tester les taux de glucose sanguin : si cela ne changera pas forcément la gestion quotidienne de votre cheval, cela pourrait aider à déterminer la cause de son mal. Selon le cas, le vétérinaire peut vous conseiller un simple rééquilibrage de son alimentation, ou encore décider de le mettre sous traitement médical.

En ce qui concerne l’herbe, certaines parcelles sont trop riches pour ces chevaux là et devraient donc leur être formellement interdites, même avec un panier. Cela ne veut pas dire que votre cheval ne pourra plus manger d’herbe. Si vous déterminez et traitez la cause, le SME peut être totalement réversible. La vraie difficulté est de déterminer ce qui a causé les problèmes de votre cheval et de savoir comment agir dessus. Certaines parcelles d’herbe « non enrichie » pourront parfois être accessibles pour les chevaux fourbus et/ou SME lors de réhabilitations. Il peut parfois être intéressant de resemer ses parcelles avec une semence spéciale pour les chevaux.

La ponette dont j’ai partagé l’évolution en photos sur la page d’accueil a passé tout l’été au pré chez moi malgré une dérégulation de l’insuline. En quelques mois, son taux d’insuline est passé de 300 à 100. C’est encore au-dessus des normes, mais pour autant elle n’a pas refait de crise et elle a récupéré très rapidement des pieds sains (radios à l’appui). Elle a pu rentrer chez sa maîtresse qui était impatiente de la récupérer. Elle n’a eu aucun traitement médicamenteux, juste une gestion adaptée de son environnement, de son alimentation et de ses pieds.

Pour conclure, s’il y a une chose à retenir, c’est que si l’insuline joue effectivement un rôle pour ÉNORMÉMENT de chevaux, ce n’est PAS systématiquement le cas de toutes les fourbures liées à l’herbe. Par conséquent, cela devra influencer la prise en charge quotidienne de votre cheval malade.