LA méthode qui surpasse toutes les autres !
Quand je me suis replongée dans les différentes techniques de parage il y a maintenant quelques années, j’ai fait comme tout le monde, j’ai cherché quelle était LA meilleure méthode ! J’ai lu tout ce que j’ai trouvé : les livres, les sites internet, les commentaires et explications de pros et de non pros sur FB et autres tchats et blogs. J’ai regardé toutes les vidéos que j’ai trouvées (sur youture il y en a des centaines…j’avoue ne pas les avoir toutes vues lol). D’abord en français, puis en anglais, et au final j’ai fini par utiliser Google traduction pour aller voir des sites dont je ne sais même pas le pays d’origine.
A ce moment là, je ne voulais pas refaire le monde ou créer une énième méthode, je voulais juste faire le mieux possible pour mes chevaux…et surtout pour Tristam.
Je ne peux pas dire que j’ai étudié réellement les différentes méthodes qui existent en France, j’avais prévu de faire de stages avec certaines personnes, mais pour des raisons plus personnelles que professionnelles, j’ai fini par abandonner l’idée. J’ai fait un stage pour apprendre la méthode Balance-F et je l’ai vraiment beaucoup beaucoup aimé. Aujourd’hui je ne peux pas dire que je pratique le Balance-F. Après seulement 3 jours de formation, je ne suis pas sûre d’avoir totalement ou correctement assimilé la méthode. Mais il s’avère que de base, mes parages n’en étaient pas loin (au moins dans l’esprit) et j’en ai gardé certains outils et points clés, notamment en ce qui concerne la gestion de l’arrière du pied.
J’en parle d’ailleurs durant mes stages en ne cachant pas mon influence à ce niveau. Je sais que les gens qui font des stages aiment faire d’autres stages, et comme j’ai trouvé celui-ci enrichissant, je partage l’info !
Le roll, LE principal sujet qui divise !
Le roll est le le sujet qui suscite le plus de débats : biseau à 45° vs parage pariétal…ou encore coupe à 90° !!
Pourquoi la technique de roll divise-t-elle autant ? D’abord parce que c’est ce que l’on voit le plus, même quand on n’y connait pas grand chose. Ensuite parce que c’est clairement la signature des différentes méthodes.
Et puis aussi un peu parce qu’elle concerne ce qu’il y a principalement à couper sur le pied : la paroi !
Certaines méthodes vous dirons de faire toujours le même roll, quel que soit le cheval, tandis que d’autres l’interdisent formellement. Personnellement je rolle systématiquement, mais AUCUN de mes chevaux ne bénéficie du même parage…ou encore du même roll. Pourquoi ? Parce que leurs pieds sont extrêmement différents. Même alimentation, même mode de vie, même activité (le pré) et pour mes deux jument, la même mère. Et pourtant il n’y a pas plus différents que les pieds de ces deux là !
Bien entendu une génétique différente va donner des pieds différents : un pied de pur-sang n’a strictement rien à voir avec un pied de shetland, ou encore avec celui d’un cheval de trait. Et j’irai même plus loin : l’antérieur droit d’un cheval peut être complètement à l’opposé de son antérieur gauche, comme c’est le cas des chevaux souffrant d’un high low. Dans le cas de ces chevaux là, c’est principalement la posture qui va engendrer la manière dont les pieds vont pousser. Mais dans d’autres cas, ce sera parfois une biomécanique altérée qui sera le cœur du problème.
J’en ai parlé dans mon premier livre, mais un cheval qui va bien devrait déposer ses pieds en commençant par les talons (c’est nettement plus flagrant au trot). Pourtant, certains chevaux n’y arrivent pas. Dans la plupart des cas, quand on s’intéresse à la podologie, ce sera le parage qu’on remettra en question. On vous dira alors de baisser encore et encore les talons : ce serait systématiquement la faute de talons trop hauts.
Pourtant il peut y avoir une multitude d’autres raisons : un douleur caudale (à l’arrière du pied)…ou encore une douleur ou un blocage situé bien plus loin dans le corps. Parfois ça peut même venir des dents !
Selon que votre cheval dépose en pince ou en talon, la pousse du pied ne sera pas la même…et si en plus votre cheval s’avère avoir de mauvais aplombs…vous vous retrouvez avec les pieds de ma jument Fantasia !
Peut-on modifier les aplombs par le parage ? Parfois oui…parfois non !
Un seul point de bascule, plusieurs méthodes possibles
Récemment, une dame a partagé des photos du parage de son cheval. Ce n’est pas le pied partagé ici, mais il y ressemblait fortement. Au premier coup d’œil, il était clair qu’il était légèrement fourbu chronique (beaucoup plus que celui-ci). Du coup, malgré que le parage puisse paraître invasif, je lui ai dit que je le trouvais très bien…mais qu’elle aurait forcément des avis très contradictoires : le roll en pince était une découpe franche à 90°.
A vrai dire en regardant les photos, je me suis dit que ça aurait pu être mon parage. Au point que je me suis retenue de demander qui était le podologue pour voir s’il n’avait pas assisté à un de mes stages. Ceux qui me connaissent savent que j’aime beaucoup utiliser cette technique. Je j’utilisais encore peu quand j’ai écrit mon premier livre, et pas de manière vraiment conscientisée et aussi réfléchie qu’aujourd’hui.
Voici donc un pied similaire, avec de tout petits signes de fourbure chronique. Globalement, le pied n’est pas vilain et si on l’observe uniquement de profil ou en vue solaire, il pourrait sembler simplement migré par manque d’entretien. Mais à gauche, la vue solaire de 3/4 permet de voir que quelque chose ne va pas : la sole semble déconnectée de la paroi. Le pied étant plat au niveau de la sole, la question est donc de savoir comment supprimer un maximum de paroi sans rendre le cheval boiteux. En effet, le vrai risque est là.
Je me suis donc amusée à représenter les différentes manières dont on aurait pu parer ce pied. Au préalable, j’ai déterminé mon point de bascule à partir de la mesure de la fourchette. Je l’ai replacé sur ma vue de profil grâce à une flèche jaune (j’ai mesuré le pied pour être à une échelle à peu près correcte).
Pour être honnête, je ne mesure jamais mes pieds, je me réfère à la ligne blanche, ce qui fonctionne tout aussi bien. Mais j’ai tenu à jouer le jeu jusqu’au bout de l’exercice.
J’ai donc tracé plusieurs lignes sur le profil de mon pied. La longue ligne jaune horizontale étant la hauteur que l’on aura supprimé avec le parage de l’avalure, vous aurez compris que les autres lignes représentent les différents types de roll :
- bleu clair : parage pariétal
- verts clair : coupe à 90° en faisant mourir un petit roll jusqu’à la ligne blanche
- en rose : biseau à 45° en partant de la ligne blanche
- en rouge : parage à 45° en partant du point de bascule
Un point intéressant à noter est que si on observe la paroi en pince, il semble que le pied soit habituellement paré avec un biveau à 45°.
Un autre point intéressant, c’est qu’un travail pariétal, s’il suit ma ligne bleue, est directement dans le prolongement de la nouvelle repousse saine tout en haut du pied (entourée en blanc).
Suis-je en train de dire que je choisirais le pariétal ?
A vrai dire je ne pratique jamais de pariétal. Mon objectif étant la réhabilitation, j’aime garder des critères d’évaluation objectifs. La qualité et l’alignement de la paroi en sont un. De plus pratiquer un pariétal sur une telle épaisseur va supprimer une bonne partie de la protection des structures internes en cas de choc frontal.
Vous l’aurez sûrement compris maintenant, je ferais une coupe à 90°. En clair, si on voulait donner un nom, je me baserais plutôt sur la méthode de Mme Tirney. Qui ça ? Et oui, ce fameux roll à 90° n’existe officiellement dans aucune méthode en France. Mais l’américaine Maureen Tierney l’utilise régulièrement et en parle dans son livre « the hoof guided method » où elle présente des photos datant de…2006 ! Rien de bien nouveau en somme.
Et si on se focalisait uniquement sur ce dont NOTRE cheval a besoin ?
Entre les photos du haut et les photos du bas, à peine plus de 2 mois se sont écoulés. Il ne d’agit pas d’un cheval fourbu mais de ma jeune jument Fantasia.
Si vous observez bien les photos du haut, ses quatre pieds, antérieurs comme postérieurs, étaient en APN (angle palmaire négatif). Pour résumer simplement, l’APN c’est l’inverse de la fourbure, au (gros) détail près que les connections lamellaires sont parfaitement intactes. Dans la fourbure, c’est la pointe de P3 qui plonge vers le bas. Dans l’APN au contraire, la pointe de P3 est trop haute par rapport à l’arrière du pied. Je referai un article sur le sujet.
J’ai suivi tous les conseils qu’on m’a donné : roller à 45° depuis la ligne blanche, ne pas roller, reculer les talons toujours plus, etc, etc… J’avais tout essayé. Enfin c’est ce que je pensais ! Et puis, un peu par désespoir, je suis sortie des méthodes et des principes figés. J’ai OSE toucher à la sole, j’ai totalement cessé de toucher à l’arrière du pied (temporairement) et j’ai modifié ma gestion de l’avant du pied. Et là, le miracle : dès le premier parage, les pieds ont changé.
Ce qui est flagrant dans le cas de Fantasia, c’est que l’arrière du pied est complètement remonté ! Ses talons étaient complètement écrasés et ils se sont littéralement redressés. Les cartilages collatéraux étaient complètement déformés et les barres s’écrasaient sous le pied. Et c’est finalement en arrêtant temporairement de toucher aux barres (entre autres choses) que les pieds ont retrouvé leur fonctionnalité. Ce qui au premier abord semblait contre-productif était en réalité la solution.
La manière dont je gère les pieds de Fantasia serait donc LA méthode magique ?
Absolument pas ! Cette manière de faire convient à Fantasia, mais elle ne conviendrait pas du tout à Tristam et encore moins à Utopia par exemple.
LA méthode qui marche est celle qui s’adapte à VOTRE cheval.
Ici je n’ai parlé que du roll, mais bien entendu il reste toutes les autres structures du pied à gérer : faut-il tailler la sole ? Faut-il toucher les barres ? A quelle hauteur doivent être les talons ? Quelle forme donner aux talons …???
La qualité d’un parage ne se résume pas au roll : le pied est un tout qu’il faut chercher à équilibrer, en évitant de contrarier la nature. Un pied bien équilibré évoluera dans le bon sens. On peut même parfois observer une différence en seulement quelques heures, ce qui de prime abord peut paraître irréaliste. Et pourtant.
J’ai déjà parlé de cela dans mon article « le parage : geste simple ou acte mystique », mais je suis convaincue qu’un bon parage doit s’appuyer sur ces 4 points :
- La position de P3 par rapport au sol est primordiale (et par conséquent l’alignement inter-phalangien)
- Le fait que TOUTES les structures du pied sont porteuses, excepté la sole primaire (et la paroi EXTERNE)
- La plupart des déséquilibres du pied ne viennent pas du pied lui-même
- Ramener les structures du pied en équilibre autour de P3 en OSANT sortir de sa propre « méthode »
Alors au final, LA METHODE ? Celle qui convient à TOUS les chevaux ?
Au risque de décevoir, à mes yeux il n’y en a pas : tout dépend du pied qu’on a entre les mains.
Je rajouterai un dernier point : ce n’est pas parce qu’un parage est beau, voir qu’il est parfait visuellement, que votre cheval s’en portera bien. Certains chevaux ont besoin de garder une paroi plus ou moins porteuse, pour d’autres au contraire il faut la supprimer. J’ai aussi écrit un petit article sur le sujet (ici).
Ici la seule chose que j’ai faite est de couper à 90°. Durant les derniers mois de la vie de ma jument Cambridge (environ 30 ans sur cette photo), je ne touchais plus aux talons, ni aux barres, sauf pour les rééquilibrer, très légèrement et très rarement. Mon seul travail consistait donc à lui poser le pied sur le trépied (là où elle était le plus confortable) et à râper « ce qui dépasse » à 90°. Je vérifiais rapidement la vue solaire…et voilà.
Et 4 semaines plus tard, ses pieds étaient toujours parfaitement équilibré. Même plus que lorsque j’effectuais un parage complet !
A la fin de sa vie, ses pieds n’étaient pas parfaits : ils étaient fonctionnels. Ca devrait être ça la priorité, car au final lorsqu’un pied redevient fonctionnel, il atteint sa propre perfection. Pas celle d’un moule inanimé (je sais de quoi je parle, je fais des statues), il redevient le pied qui correspond au cheval qui se trouve au dessus.
J’ai VRAIMENT compris seulement à la fin de sa vie que pour certains chevaux, supprimer trop de paroi est une véritable maltraitance…là où pour nos chevaux fourbus, c’est la clé de leur réhabilitation. Et même pour ces chevaux là, on ne supprime pas la totalité de la paroi, excepté à l’avant du pied. Tout est question de dosage et d’observation.